Pour commencer

Pour comprendre l’Europe bancaire et monétaire, il faut toujours avoir à l’esprit la distinction entre l’Union européenne et la zone euro. En effet, l’Europe bancaire concerne tous les Etats de l’Union européenne alors que l’Europe monétaire ne concerne que ceux de la zone euro.

Voici quelques éléments pour poser le décor.

1 – L’Union européenne (UE)

Composition : elle est, depuis le 1er  février 2020, composée de 27 Etats membres puisque la sortie du Royaume-Uni (RU) de l’UE est devenue juridiquement effective le 31 janvier 2020 à minuit (heure de Bruxelles. Voir nos différents Banque-Notes Express sur le sujet, depuis   Banque-Notes Express du 27 juin 2016). Après une période transitoire qui a pris fin le 31 décembre 2020, l’UE et le RU sont désormais liés par un accord de commerce et de partenariat : voir Banque-Notres Express du 27 décembre 2020.

Textes organisant l’UE
– Les traités : l’Union européenne repose aujourd’hui sur deux traités : le traité sur l’Union européenne (TUE) et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
– La législation européenne élaborée sur la base des traités (on parle de droit dérivé) : règlements, directives, recommandations.

Institutions élaborant la législation européenne
Le Conseil européen. Il réunit les 27 chefs d’Etat ou de gouvernement. Il fixe les axes de développement de l’avenir de l’UE. Son président est nommé pour une durée de 2 ans ½ renouvelable une fois : Herman van Rompuy a terminé son deuxième mandat le 30 novembre 2014. Son successeur, Donald Tusk, a donc pris ses fonctions le 1er décembre 2014, et jusqu’au 30 novembre 2019. Charles Michel lui a succédé le 1er décembre 2019 (voir notre Banque-Notes Express du 3 juillet 2019). Son mandat ayant été renouvelé, il est en fonction  jusqu’au 30 novembre 2024.
Le Conseil de l’Union européenne. Il réunit les ministres des 27 Etats selon le domaine concerné : par exemple, pour les questions d’économie et de finances, ce sont les ministres en charge de ces questions dans leur pays qui siègent dans ce Conseil (dit ECOFIN). Chaque Etat assure successivement et pour 6 mois la présidence du Conseil de l’ Union européenne (voir Présidence tournante de l’UE).
La Commission européenne. Elle est à ce jour composée de 27 membres (en pratique appelés commissaires). Chacun a été proposé par un Etat, mais il n’en est pas le représentant. Par exemple, dans la Commission qui avait pris ses fonctions le 1er novembre 2014 sous la présidence de Jean-Claude Juncker,  Pierre Moscovici avait été nommé sur proposition de la France. Dans l’actuelle Commission en fonction depuis le 1er décembre 2020 sous la présidence d’Ursula von der Leyen, Thierry Breton a été nommé sur proposition de la France. Une nouvelle Commission est en cours de constitution : à la suite des élections européennes de juin 2024, le Parlement européen a réélu le 18 juillet 2024 Ursula Von der Leyen pour un deuxième mandat. Les nouveaux commissaires seront nommés dans les prochaines semaines. A chaque commissaire est attribué un domaine de compétence : voir notre Banque-Notes Express du 14 décembre 2019.  La Commission émet les propositions de textes. Elle les transmet au Parlement européen et au Conseil de l’UE pour examen et amendements. Ces textes seront adoptés lorsque le Parlement et le Conseil seront d’accord sur une rédaction définitive. On parle de “procédure législative ordinaire” (on disait auparavant “co-décision”). La Commission veillera ensuite à la bonne application de ces textes par les Etats. 
Le Parlement européen. Elu au suffrage universel direct par les citoyens de l’UE, il siège en séances plénières à Strasbourg, mais tous les travaux dans les différentes commissions parlementaires, se font à Bruxelles. Comme on vient de l’expliquer, dans la procédure législative ordinaire, le Parlement adopte ces textes conjointement avec le Conseil de l’UE. Dans certains domaines, la procédure spéciale est applicable : les textes sont soumis au Parlement seulement pour avis ou approbation en l’état (sans pouvoir les amender).

Dans quels domaines ?
L’Union européenne peut adopter une législation qui s’impose à tous les Etats membres dans de nombreux domaines. C’est ainsi que dans les domaines de la banque, des marchés financiers et de l’assurance, des textes européens ont organisé au fil du temps le « marché unique des services financiers ».

Qu’est ce que le « marché unique des services financiers » ?
Il faut l’envisager du côté  des établissements et du côté des clients.
Pour les établissements : le marché unique des services financiers leur donne la liberté d’exercer leur activité dans tous les Etats de l’Union européenne grâce au principe de l’agrément unique. Selon ce principe, tous les établissements de crédit, de paiement, de monnaie électronique, de même que les entreprises d’investissement ou  d’assurance, qui veulent exercer leur activité dans un Etat de l’Union européenne doivent, au préalable, être agréés dans cet Etat. L’agrément est délivré sous certaines conditions dont les principales sont identiques dans toute l’Union parce qu’elles ont été harmonisées. Grâce à l’agrément qu’il a reçu, l’établissement peut exercer son activité dans les tous les autres Etats membres, soit en y implantant une succursale, soit tout simplement à distance à partir de son Etat d’origine. (Cela était encore vrai pour le Royaume-Uni pendant la période transitoire ouverte le 1er février 2020 et achevée le 31 décembre 2020 ; cela n’est plus vrai depuis le 1er janvier 2021).  Ainsi, l’agrément délivré par un Etat des 27 Etats membres est valable dans tous les 26 autres. On parle d’agrément unique ou plus communément de passeport européen. Les Etats reconnaissent mutuellement les agréments délivrés par les autres. Il y a reconnaissance mutuelle des agréments et des contrôles.
Ce système a connu une profonde évolution depuis la mise en œuvre effective, le 4 novembre 2014, du mécanisme de supervision unique (MSU) : l’agrément et le contrôle des établissements de crédit de la zone euro sont désormais de la compétence de la Banque centrale européenne, plus précisément de son Conseil de surveillance prudentielle créé fin 2013  et présidé par Danièle Nouy jusqu’en fin 2018, puis par Andrea Enria. Depuis le 1er janvier 2024, il est présidé par Claudia Buch.

 Pour les clients : il s’agit d’assurer à tous les consommateurs de services financiers, la même protection dans tous les Etats de l’Union européenne. Les relations contractuelles ou pré-contractuelles entre les établissements et leurs clients ont été harmonisées (ou vont l’être) : contrat de crédit à la consommation, prêt immobilier, services financiers à distance, etc., sans oublier désormais la finance numérique, voir Banque-Notes Express du 30 avril 2022.

2 – La zone euro : l’Union monétaire

Composition : elle est composée des Etats de l’Union européenne qui ont l’euro comme monnaie. Ils sont 20 parmi les 27 Etats membres de l’UE, et cela depuis le 1er janvier 2023 date d’entrée de la Croatie dans la zone euro.
Tous les Etats de l’UE ont vocation à entrer dans la zone euro (s’ils le souhaitent) et  s’ils en remplissent les conditions (fixées par les Traités tels que modifiés en 1992 par le Traité de Maastricht). 

Naissance : la zone euro est née le 1er janvier 1999 avec la naissance de l’euro d’abord sous la forme scripturale ; les pièces et les billets  n’ont été mis en circulation que le 1er janvier 2002. Voir Banque-Notes-Express du 6 janvier 2022.

Conditions de mise en oeuvre
– une politique monétaire unique.  Les Etats ayant adopté l’euro ont donc transféré leur pouvoir de contrôler la monnaie à une banque centrale unique. L’Union monétaire est ainsi réalisée. On peut parler d’Europe monétaire ;
– la création d’un système réunissant les 20 Banques centrales nationales et la Banque centrale européenne pour définir et mettre en œuvre cette politique monétaire unique. Cet ensemble est appelé l’Eurosystème. Il doit être distingué du Système européen de banques centrales (SEBC) qui regroupe autour de la BCE, les 27 Banques centrales nationales de l’Union européenne. Le SEBC assure notamment le bon fonctionnement des paiements entre banques de l’Union européenne;
– une coordination des politiques budgétaires et économiques prévue par le pacte de stabilité et de croissance, plusieurs fois réformé, notamment par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (dit TSCG, en vigueur depuis le 1er janvier 2013). On remarque que ces politiques restent de la compétence des Etats (sous un certain contrôle, il est vrai, des instances européennes) et en cela l’Union économique n’est pas encore achevée, contrairement à l’Union monétaire.  L’Union économique et monétaire (UEM) n’est donc qu’en partie réalisée. 

La Banque centrale européenne : elle est située à Francfort-sur-le-Main (Allemagne). Son organisation et ses missions sont fixées par les Traités et par le protocole n°14 qui y est annexé. D’abord présidée par Wim Duisenberg, puis par Jean-Claude Trichet, puis par Mario Draghi, elle est depuis le 1er novembre 2019 présidée par Christine Lagarde (voir Banque-Notes Express du 3 juillet 2019).

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