Politique monétaire de la BCE – Programmes OMT et QE 2015

Politique monétaire de la BCE

Les programmes « OMT » et « QE 2015 » : quelle différence ?

Le 9 mars 2015, la Banque centrale européenne a commencé à exécuter son programme d’assouplissement quantitatif (en anglais QE pour Quantitatif Easing), annoncé le 22 janvier 2015, et qui est également appelé programme d’achats de titres du secteur public (en anglais Public Sector Purchase Programme– PSPP).

Or, en septembre 2012, elle avait annoncé un programme OMT (opérations monétaires sur titres ou en anglais Outright Monetary Transactions) qui lui n’a jamais été mis en œuvre, le seul fait que Mario Draghi, président de la BCE, ait indiqué que son ampleur serait « sans limite » ayant suffi à atteindre momentanément son objectif. L’OMT n’en reste pas moins dans l’actualité car la Cour de justice de l’Union européenne doit statuer prochainement sur sa compatibilité avec les traités européens (et plus précisément sur la question des compétences de la BCE).

Tout cela est très technique, mais n’interdit pas de comprendre, notamment ce qui distingue ou rapproche les deux programmes. Essayons… en simplifiant beaucoup. 

Attention à la terminologie
Il convient d’abord de ne pas se focaliser sur le vocabulaire utilisé car dans les deux cas, il s’agit de ce qu’on appelle généralement un assouplissement quantitatif (QE), en ce sens qu’il y a une injection importante de liquidités opérée par une banque centrale. L’OMT est donc un programme de QE même s’il n’en porte pas le nom.

Ce qui est identique dans les deux programmes
Dans les deux cas :
–  l’injection de liquidités doit se faire par l’achat de titres essentiellement souverains (obligations d’Etats) sur le marché secondaire (donc à des investisseurs qui les détiennent déjà) et non pas sur le marché primaire (directement aux Etats car cela est interdit par l’article 123 du Traité sur le fonctionnement de l’UE) ;
et
– il s’agit de mesures de politique monétaire dites « non conventionnelles », par opposition aux mesures de politique monétaire traditionnelles, dites « conventionnelles » (fixation des taux directeurs des opérations de refinancement et opérations d'open market) (sur ces instruments traditionnels voir site Banque de France).

Quelle différence alors entre ces deux programmes ?
Ils diffèrent dans leur objectif et leur mécanisme.
 L’OMT, annoncé en 2012, visait la stabilité financière au profit des Etats de la zone euro ayant des difficultés à se refinancer et qui étaient soumis à un plan d’assistance financière du Fonds européen de stabilité financière (FESF) ou du Mécanisme européen de stabilité (MES). Les achats de titres de ces Etats par la BCE devaient être conditionnés par le respect de ces plans et devaient cesser avec ces plans. Par ailleurs, la BCE s’était engagée à annuler les conséquences monétaires de ses achats en stérilisant, par des reprises de liquidités, le montant des sommes qu’elle aurait ainsi injectées.
Certains particuliers allemands (responsables politiques, professeurs,…) ayant contesté la légalité de ce programme, un recours a été formé devant la Cour de justice de l’Union européenne. Selon l’avocat général qui a rendu ses conclusions le 14 janvier 2015, le programme OMT est en principe compatible avec les traités européens. L’arrêt de la CJUE  est attendu (mais sans grand suspense compte tenu de l’avis de l’avocat général).

Le programme QE 2015 a un objectif strictement monétaire : il vise à ramener l’inflation vers les 2%.
Il y a là encore injection massive de liquidités par des achats de titres, mais tous les Etats de la zone euro sont concernés. Le programme présente une originalité en ce que le risque n’est pas totalement supporté par la BCE (il n’est donc pas totalement mutualisé) : une partie des achats de titres est effectuée directement par chaque Banque centrale nationale concernée, laquelle en supporte ainsi le risque (par exemple la Banque de France achète, toujours sur le marché secondaire, les obligations de l’Etat français, la Banque d’Italie celles de l’Etat italien, etc.). Mais la décision est prise par la BCE (sur les relations BCE/Banques centrales nationales, voir Banque-Notes juillet 2013 et notamment l'Entretien avec Christian Noyer).

Le programme, annoncé le 22 janvier 2015, a donc débuté le 9 mars 2015 et doit se dérouler à raison de 60 milliards d’achats de titres par mois, jusqu’en septembre 2016. A suivre.

Pour les amateurs de précisions techniques, voir en français sur le site de la Banque de France, le Communiqué de presse de la BCE.

 

Blanche Sousi
et son équipe