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L'accord Canada/UE concerne aussi les services financiers.

Qu’est-ce que cela va changer ?

Nos amis wallons ont largement contribué à la récente médiatisation de l'accord économique et commercial global (AECG) plus connu sous le sigle CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement). En bloquant, à partir du 14 octobre et pendant quelques jours, l’approbation de cet accord par la Belgique, ils ont placé sous les projecteurs un texte dont nombre de citoyens ignoraient jusqu’alors l’existence même.

On souligne au passage que si cet épisode a juridiquement été possible, c’est parce que les parties à l’accord sont d’une part le Canada, et d’autre part l’Union européenne et ses Etats membres : il fallait donc recueillir non seulement le consentement du Canada et de l’Union européenne, mais aussi  celui de chacun des 28 Etats membres. Après des négociations qui ont permis certains aménagements et engagements, l’accord a finalement été signé le 30 octobre dernier (texte de l'accord).

La procédure n’est pas terminée pour autant car le Parlement européen doit maintenant approuver le texte (le vote pourrait intervenir début 2017), texte qui devra ensuite être ratifié par chacun des parlements nationaux, voire régionaux (s’agissant de certains Etats ayant un système fédéral), pour entrer définitivement en vigueur…. Ce qui prendra un certain temps : les opposants au principe même d’un tel accord de libre-échange peuvent peut-être espérer que l’entrée en vigueur définitive n’intervienne jamais.

Ce serait oublier que, sans attendre ces ratifications nationales, quasiment toutes  les dispositions du CETA entreront en vigueur à titre provisoire dès l’approbation du Parlement européen, sauf celles concernant le nouveau système de règlement des litiges entre investisseurs et Etats. Ce système (prévu aux articles 8-18 et suiv. du CETA) qui était au cœur de la contestation lors de l’épisode belge, cristallise encore de nombreuses critiques : face à ces oppositions,  le Canada et la Commission européenne se sont engagés à mettre à profit la période nécessaire aux ratifications nationales pour apporter les modifications utiles à lever toute réticence.

Outre ce sujet de contestation, il a également été beaucoup question dans la presse, d’agriculture, de normes sociales, de normes environnementales, des bienfaits et des méfaits du libre-échange ; mais de services financiers, il fut peu (pas ?) question. Pourtant un chapitre entier leur est consacré.

Nous ne résistons donc pas à la tentation de le signaler ici et d’en dire quelques mots. Il s’agit du Chapitre 13 de l’accord dont la lecture peut dérouter ceux des lecteurs qui sont peu familiers des accords internationaux, et en particulier du GATS (AGCS - Accord général sur le commerce des services) qui, on le rappelle, est annexé à l’accord de Marrakech de 1994,  instituant l’Organisation mondiale du Commerce (OMC).

On retrouve en effet, dans ce chapitre 13 du CETA, des dispositions identiques à celles figurant dans le GATS notamment, traitement national, clause de la nation la plus favorisée, accès aux marchés, spécificité des services financiers (exception prudentielle et règles encadrant la reconnaissance des mesures prudentielles).

Il ne faut pas s’en étonner car toutes les parties au CETA (Canada, UE et ses 28 Etats membres) sont toutes parties au GATS. Même si le CETA n’avait pas repris ces dispositions, elles seraient applicables du fait du GATS. Il était néanmoins logique de les réaffirmer avec, il est vrai, quelques dispositions supplémentaires, très techniques, qu’il ne nous paraît pas utile d’évoquer ici.

Alors, ces quelques dispositions mises à part, quel est l’apport du CETA en matière de services financiers ? On note la création d’un Comité des services financiers (article 13.18) qui permettra d’entretenir, entre les parties, un dialogue sur la règlementation du secteur des services financiers.

On note surtout (article 13.21) que les dispositions générales du CETA concernant le règlement des litiges  relatifs aux investissements entre investisseurs et Etats,  s’appliqueront en matière de services financiers, mais avec un mécanisme permettant d’éviter que l’un de ces litiges empêche la mise en œuvre de mesures visant à la stabilité financière. Nous écrivons « s’appliqueront » car, comme indiqué plus haut, il s’agit là de dispositions qui n’entreront en vigueur qu’après les ratifications nationales. A suivre.

Pour l’heure donc, il est vrai que cet accord économique et commercial global de libre-échange que constitue le CETA n’apporte pas de changements essentiels en matière de services financiers ; cependant, il est  sans doute de nature à favoriser le développement des activités bancaires et financières (y compris assurantielles) entre le Canada et l’UE et ses Etats membres.

Certains y verront une opportunité, pour les professionnels du secteur financier et leurs clientèles, de développer des relations transatlantiques avec un partenaire alternatif aux Etats-Unis, bien qu’évidemment de moindre importance.

 

 

                                                                                                                                    Blanche Sousi
                                                                                                                                     et son équipe